Présentation d'e-lyco par David Cottrel

Vous avez accompagné le déploiement d'e-lyco ces dernières années. Pouvez-vous nous décrire le projet en quelques mots ?

David Cottrel : e-lyco est un ENT (environnement numérique de travail) qui couvre aujourd’hui l’ensemble du territoire académique : tous les établissements du secondaire, collèges, lycées, lycées professionnels, EREA, disposent de leur portail ENT e-lyco, et ce, que l’établissement soit public ou privé ou dépende de l’enseignement agricole.
C’est le résultat d’un partenariat exemplaire entre les collectivités en charge de ces établissements (les cinq conseils généraux de Loire-Atlantique, Maine-et-Loire, Mayenne, Sarthe et Vendée et le conseil régional des Pays-de-la-Loire)  et le rectorat de l’académie de Nantes.
Un élève entrant aujourd’hui au collège bénéficie désormais du même environnement de travail de la 6ème à la Terminale, quel que soit l’établissement de l’académie où il étudie. C’est aussi un avantage pour les professionnels enseignants ou non-enseignants qui retrouvent le même environnement de travail dans tous les établissements où leurs missions les conduisent. Un enseignant affecté sur deux établissements peut aisément réutiliser des contenus de son cahier de textes d’un établissement dans l’autre.
Chaque portail e-lyco offre aux établissements une partie publique et un espace réservé. Les outils de publication dans la partie accessible au monde entier sont les mêmes que dans les espaces après identification, ce qu’on ne retrouve pas dans d’autres projets ENT. Si les outils et services proposés par e-lyco sont les mêmes pour tous, cela n’empêche aucunement la personnalisation des portails par les établissements qui définissent eux-mêmes leur politique éditoriale.
Une application mobile spécifique a été développée et mise à disposition des utilisateurs en lycée (enseignants, élèves, parents) : elle permet d’accéder simplement en consultation au cahier de textes ainsi qu’aux actualités de l’établissement, son usage s’est très rapidement répandu dans les lycées de l’académie. Une version 2 enrichie est attendue pour l’an prochain et sera proposée aux collèges.
Dernière caractéristique à signaler, tous les portails e-lyco s’inscrivent dans un réseau de portails interconnectés : ainsi, il est possible d’associer simplement à un groupe existant dans l’établissement un intervenant extérieur en provenance d’un autre établissement e-lyco, de même les portails institutionnels (de la collectivité de référence ou du rectorat) peuvent ainsi pousser des informations vers les utilisateurs en établissement (cette communication est encadrée par une charte commune).
La place du professeur documentaliste a été affirmée dès le départ du projet comme celle d’un enseignant parmi les autres, il dispose ainsi d’une possibilité d’intervenir dans les rubriques de classe pour y publier des contenus ou saisir des séances dans le cahier de textes sans manipulations supplémentaires de la part de l’administrateur, ni de contournements particuliers.

Quelle a été votre stratégie de déploiement en termes de moyens, de formation, d'accompagnement ?  

David Cottrel : Le déploiement a démarré en janvier 2010 et s’est achevé en octobre 2013. 5 vagues de mises en place se sont succédées en parallèle à plusieurs montées de version du logiciel ce qui a conduit l’équipe de formateurs (une trentaine d’enseignants, de formateurs et de membres de la DAN ou la DSI du rectorat) à constamment adapter la formation à la fois à l’expérience acquise et aux nouveautés fonctionnelles.
À partir de la 3ème vague nous avons systématiquement cherché à associer les personnels de direction à l’équipe formée pour la prise en charge de l’ENT en établissement afin d’insister sur le nécessaire pilotage d’un tel déploiement. L’équipe e-lyco formée en établissement se compose a minima d’un administrateur en charge de la gestion du portail et d’un coordonnateur pédagogique plus spécifiquement chargé de l’accompagnement des collègues enseignants. Ce « noyau » est chargé de mettre en place l’ENT de retour en établissement en concertation avec le comité de pilotage local : création de rubriques de travail ou de publication, gestion des droits d’accès, distribution des tâches d’administration, création des comptes élèves / parents, assistance aux utilisateurs. Selon la taille des établissements nous avons offert des places supplémentaires en formation (jusqu’à 6 pour les très gros lycées de l’académie) pour aider à constituer localement les équipes en charge du projet localement. Le temps de la formation, lorsque les équipes étaient bien constituées et que le chef d’établissement ou son adjoint était au pilotage, a souvent été l’occasion pour les établissements de bien démarrer dans leur appropriation de l’ENT et d’échanges très enrichissants avec les formateurs et les autres stagiaires. On constate dans ces occasions que l’arrivée d’un ENT permet de repenser des organisations, de se poser de vraies questions en termes de pédagogie, de pilotage, de communication interne et externe, etc.

Les personnes ressources ainsi formées ont aussi pour mission de répliquer ensuite la formation en établissement. Plutôt que de former à toutes les possibilités de l'ENT, il a été fait le choix de proposer une série de scénarios de formation (modulables en fonction des compétences et des attentes de stagiaires) répondant à des besoins métier : je suis enseignant, je dois remplir mon cahier de textes, comment faire ? Je suis chef d'établissement, je dois mettre en place un espace collaboratif pour un conseil d'administration, comment faire ? etc. L'idée était de proposer des documents régulièrement actualisés par l'équipe des formateurs et facilement réutilisables en établissement pour éviter aux personnes ressources e-lyco de refaire de la documentation d'accompagnement (imaginez, 650 établissements déployés, 650 personnes recréant des tutoriels chacun dans son coin…), l'objectif étant qu'elles se consacrent à l'accompagnement local des personnels. C'est là où le dispositif atteint ses limites, nous avons mis en place une formation de formateurs en établissement qui a globalement bien répondu au besoin initial mais la formation de l'utilisateur final, enseignant, agent, élève et même parent dépend ensuite des personnes ressources et de l'engagement du reste de l'établissement et de sa direction. Depuis 2 ans maintenant, cette base de scénarios s'est enrichie d'une série de fiches d'usages montrant la richesse des pratiques mises en place en établissement avec l'ENT pour répondre à leurs besoins.

Y-a-t-il des points de résistance ? Et quelles sont les perspectives envisagées pour le renouvellement du marché public ?

David Cottrel : Les points de résistance sont bien identifiés, un travail spécifique avait été fait en amont sur ce thème afin de fournir des éléments pour accompagner l'arrivée de l'ENT en établissement. L'un des éléments les plus souvent évoqués est celui du temps que demande la bonne gestion de l'ENT ainsi que la charge de travail que son fonctionnement peut supposer.
Il est difficile au démarrage du projet de bien évaluer la charge de travail pour les personnes qui prennent le rôle d’administrateur ou de coordonnateur pédagogique, la complexité de création des comptes élèves (nous utilisons les comptes pour les téléservices) gérés sur un autre environnement tout comme ceux des parents, même si la procédure est robuste et permet de garder la main sur les données personnelles n’est pas facilitante.

Idem, la mise en place des cahiers de textes e-lyco, élément central de l’ENT e-lyco, fortement lié aux autres fonctionnalités (réservation de ressources, classeur pédagogique, messagerie, etc.) dépend d’une parfaite articulation entre le logiciel d’emploi du temps, les bases de données élèves et personnels et l’ENT, ce qui demande une bonne coordination des différents acteurs concernés (secrétariats, direction, personnes-ressources). Mais ce sont des problèmes rencontrés par tous les projets ENT en France.
Un autre reproche régulièrement exprimé par les utilisateurs concerne le logiciel lui-même et son fonctionnement, des progrès dans l’ergonomie sont attendus, son aspect commence à dater et jure dans le paysage du web 2.0 actuel (voir 3.0) ! Il faut dire que le design remonte au lancement du déploiement, 2010, 4 ans ce n’est pas rien à l’heure actuelle sur le web… Cet aspect a été priorisé pour le renouvellement du marché : dans la procédure de marché négocié en cours avec l’éditeur, le choix a été fait d’améliorer au maximum l’expérience utilisateur en s’appuyant sur les très nombreux retours recueillis depuis les premiers déploiements.