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Le 14 Juillet, naissance d’une fête nationale

Les enjeux du débat

La résolution de la crise du 16 mai 1877 par l’intervention du suffrage universel oriente la République vers un régime durablement parlementaire. La majorité obtenue en 1876 est confirmée lors du retour des électeurs devant les urnes suite à la dissolution voulue par le président Mac-Mahon. Le passage du Sénat aux mains des républicains au début de l’année 1879 puis, dans les jours qui suivirent, la démission de Mac-Mahon refusant le sort réservé par le gouvernement à quelques militaires monarchistes permettent le contrôle de l’ensemble des institutions par les républicains. L’enracinement de la République se construit par la mise en place d’un corpus législatif favorisant la républicanisation du régime, l’affirmation de son caractère démocratique et la sécularisation de la société. Si l’enracinement se construit également par la capacité du régime à sortir victorieux des crises politiques que Michel Winock nous a montrées comme étant soit fondatrices, soit de maturité, il s’affirme également par un ensemble de symboles, la mise en place de rituels et de pratiques collectives (Michel Winock, La Fièvre hexagonale : les grandes crises politiques. 1871-1968, Calmann-Lévy, Paris, 1986, 428 pages).

Ainsi, en 1880, les députés républicains sont-ils confrontés à la nécessité d’offrir à la Nation une fête collective dont il faut fixer la date, organiser le contenu. Vers 1880, « la Révolution rentre au port », dès lors les événements de 1789 et des années qui suivent se transforment en mythes fondateurs. Événement mêlant l’ordre imaginaire et l’ordre réel, considéré comme fondateur, le mythe renvoie nécessairement au récit des origines et inscrit le présent de la troisième République naissante dans une continuité historique. « Le drame de 1789 ne cesse de se rejouer », nous dit encore François Furet, in Penser la Révolution française, Paris, Gallimard, coll. « Bibliothèque des histoires », nouvelle édition revue et corrigée, 1983, p 20. Nous nous reporterons aux extraits du débat au sénat en 1880.

Alors quelle date choisir ? Lui donner d’abord un but : permettre de réunir l’ensemble de la Nation en une commémoration commune, admise par tous sans créer de dissension en un corps auquel tous entendent appartenir même si cette appartenance relève elle aussi de la construction à la fois pédagogique et mythique. La place du peuple dans l’événement doit être centrale pour le choix des députés. Il doit avoir joué le rôle majeur, dans une démarche d’émancipation, d’affirmation de sa souveraineté à la recherche de sa liberté, sans que la violence, notamment la violence gratuite faite aux corps, n’ait été présente ou du moins déterminante. D’autre part, le législateur dominant veut éviter les divisions entre les différents groupes de républicains, ici entre opportunistes et radicaux tant du reste un autre combat va certainement se jouer. Le choix d’une date inscrite dans l’héritage révolutionnaire risque de réactiver les mouvements d’opposition à la République liés à la pensée contre-révolutionnaire.