Vous êtes ici :

Préparation au CAPES interne : méthodologie de la note de synthèse à partir d'un dossier : corrigé

par Serge Laurent,
[novembre 2004]

Mots clés : note de synthèse , CAPES

  • Google+
  • Imprimer

La motivation, oui mais comment ? : corrigé de la note de synthèse

Introduction

Le rapport de jury 2003 rappelle que la note de synthèse est conçue obligatoirement de la manière suivante : l'introduction place l'objet d'étude dans un contexte plus général (système éducatif, problème de société, grandes réformes, nouveaux dispositifs...), présente le contenu "matériel" du dossier (nombre de documents et caractérisation succincte) puis annonce clairement et distinctement la problématique retenue et le plan choisi pour  en traiter."

Un essai parmi d'autres :

Plébiscité lors d'une rencontre à l'occasion du Grand débat sur l'Education en 2003, le thème de la motivation, lorsqu'il est présenté sous la forme d'un objectif à atteindre et non comme le résultat d'un constat d'échec irrémédiable, ne peut être taxé de banal ou de secondaire tant il touche à l'ensemble des méthodes, des attitudes et des structures de l'institution scolaire et de la pédagogie. La diversité des partenaires dont les écrits constituent le présent dossier renforce encore la position stratégique que ce sujet occupe ; qu'il s'agisse de pédagogues tels que Jean Houssaye (Document 1) qui étudie les rapports entre la motivation et les dernières théories de l'apprentissage dans un article paru dans la revue Education ou Philippe Meirieu (document 4) qui s'interroge plus particulièrement sur la construction des apprentissages et le sens à leur donner par le biais du désir dans une monographie qui en est à sa cinquième édition ; qu'il s'agisse encore d'universitaires comme F. Lombard (Document 3) qui insiste sur l'attractivité de l'Internet et sur "aménagement" dans un article en ligne paru en 2001. Pédagogues, universitaires, les formateurs ont également la parole : Cécile  Delannoy dans une monographie co-éditée par  Hachette et le CNDP en 1994  (Document 4) pour qui savoirs, temps, sens et confiance viendront nourrir le projet de l'élève et sa motivation, orientations dominantes, que les psychologues et psychanalystes Fabien Fenouillet et Jacques Lévine (document 5) viendront renforcer dans une contribution en ligne parue sur le site des Cahiers pédagogiques.

Concevoir les meilleures méthodes pour assurer des apprentissages porteurs d'autonomie libératrice, voilà ce que l'on demande à l'école : comment celle-ci peut elle donner du sens à ses diverses missions pour susciter et entretenir les motivations des élèves ? Cette problématique refuse dans un premier temps l'indispensable acquisition de savoirs (revivifiés) et remodelés par une quête permanente de sens et ouvre dans un second temps, des perspectives à plus long terme, dans lesquelles la poursuite d'objectifs de réussite et d'épanouissement personnel se révélera génératrice d'une motivation en permanente structuration.

1er partie : Démotivation, sens et apprentissages

La motivation est une force qui détermine le comportement. Tous les auteurs en conviennent, sans désir, en l'absence de cette énergie caractéristique, la perte de confiance s'installe chez l'élève, le découragement le gagne, c'est le temps de la résignation. Plus que les autres, Jacques Lévine (Document 5, contribution lors d'une journée de formation continue à l’IUFM de Paris, mise en ligne en février 2004 sur le site du CRAP. Cahiers pédagogiques) insiste sur les causes du phénomène de démotivation qu'il attribue à des savoirs inadaptés, qu'il qualifie de "trop abstraits" ou encore de "fossilisés" et à la mission dénaturée des enseignants d'aujourd'hui, mais dans l'ensemble, c'est au traitement du problème posé que va l'essentiel du dossier. Il y a consensus sur l'existence de la motivation qui, en contre partie, ne se décrète pas, n'est pas un don du ciel mais se construit selon le processus de tout échafaudage complexe, fragile, mais riche de mise en oeuvre de techniques. Mais on ne peut rien faire sans artisan et sans matériau. Pour susciter la motivation il faudra également des maîtres et du sens pour élaborer le premier étage, celui des apprentissages.

Nous allons voir comment les auteurs donnent, chacun à leur façon, du sens aux apprentissages. Le passage sur la position de Philippe Meirieu n'est pas rédigée ; mais c'est intentionnel et rappelez- vous que vous ne devez en aucun cas, insérer un plan ou des notes en style télégraphique dans le développement. ). Reprenons...

L'apprentissage a connu plusieurs théories, Jean Houssaye (Document 1, "Construire la motivation ?" Revue Educations de décembre 1994 ) en rappelle les espoirs et les limites (rapports professeurs-savoirs - primat de l'affectif - primat du cognitif) pour insister sur celle qui lui paraît la plus féconde, le rapport élèves-savoirs. Dans ce dernier cas, la motivation apparaît comme une potentialité que les situations d'apprentissage chargées de sens viendront fortifier : il s'agit d'une école où l'on explique la fin et les moyens et où s'établit une interpellation réciproque entre maîtres et élèves, une école qui reste sans doute bien trop traditionnelle pour J. Lévine (Document 5) même si elle recherche elle aussi du sens dans l'adaptabilité, la diversification, les élans émotionnels. Celle de J. Lévine  est en effet une école dont la remise en cause touche au plus profond de l'institution scolaire, écartant des décennies de tradition où triomphent le manuel scolaire et l'abstraction. Ce devrait être un lieu où, au contraire, le sens émane d'une pensée plus concrète, plus pragmatique, centré sur le savoir faire et les "choses de la vie". Toujours pour J. Lévine  il faudrait en priorité rapprocher les lieux de l'école et la vie sous peine de décourager chez l'élève la démarche de chercheur et de découvreur, inspiratrice selon lui de sens et de motivation. C'est précisément dans ce dernier domaine - chercher et découvrir - que Philippe Meirieu (document 4,  "Apprendre... oui, mais comment ?" chez  ESF en 1990) va donner un exemple d'inventivité de savoir faire pédagogique qui fait appel à la fois à l'imagination et au raisonnement, à la maîtrise et ... au désir. Car, selon P. Meirieu le désir se crée, le désir s'apprend :

  • description du parcours : écueils majeurs - verbes forts (ignorer, socialiser) - voies anciennes et voies nouvelles
  • objectifs : favoriser les apprentissages, les savoirs (insister sur la situation problème)
  • moyen : donner du sens au mystère pour investir de nouveaux espaces (savoirs)

Synthèse et transition vers la 2ème partie

Pour  Meirieu, Jean Houssaye, Lombard, Lévine  (Attention : pensez à référencer correctement les documents qui ne l'ont pas encore été)

  • amener l'élève à trouver des solutions qu'il construit lui même
  • pourvu qu'il prenne conscience de ses forces, qu'il consolide son estime de soi, qu'il fortifie son espérance de réussite

Tous ces éléments doivent renforcer la motivation nécessaire à l'élaboration d'un projet.

Fin de la 1ère partie

2ème partie : Sens aux projets d'élève, d'enfant, d'homme et motivation

Il faudrait parler de projets au pluriel puisque pour nos auteurs la mission de l'école est multiple : conférer à l'élève une autonomie suffisante pour qu'il puisse préparer à la fois un projet professionnel, un projet de vie et un projet de soi. L'autonomie ne se décrète pas elle non plus, elle ne peut s'affirmer sans apprentissage et savoirs bien assurés et ce sont eux qui, à leur tour, vont donner un sens au projet professionnel qui, pour fondamental qu'il soit, ne se suffit pas à lui même. C'est qu'en effet pour C. Delannoy (Document 2, "La motivation : désir de savoir, décision d'apprendre" édité en  1997), la prolongation de la scolarité a développé d'autres formes que le "moi social", la prise en compte du "moi ludique et créatif" faisant apparaître des liens nouveaux entre activités professionnelles et savoirs scolaires, ces derniers ne pourront plus être considérés comme de simples outils d'évaluation. L'émergence de cette relation signifie qu'il reviendra aux enseignants de révéler l'intérêt immédiat des savoirs mais aussi leur utilité dans la vie et de surcroît de susciter le plaisir de les acquérir (satisfaction des divers "moi"). En jouant sur l'opposition desserrer/resserrer  C. Delannoy aborde le débat qui consiste à dédramatiser l'enjeu du projet professionnel qu'elle juge trop étriqué si l'élève ne prend pas conscience de la corrélation entre l'acte d'apprendre et l'acte de travailler. On retrouve dans son raisonnement l'appel à resserrer le lien entre l'immédiat et le futur.

Ce réajustement préfigure l'annonce de fondement sur la nécessité, que Jean Houssaye, comme C. Delannoy, envisage en terme de construction à fortifier :

  •  projet de vie qui pour C. Delannoy et Jean Houssaye ne peut émerger que de la résolution d'un conflit entre les difficultés à surmonter et la dynamique de réussite qu'on lui oppose
  •  projet de vie où la notion d'effort prime évidemment
    •  effort pour exercer un contrôle sur...(je ne veux pas être simple spectateur de ma vie... je veux au contraire avoir prise sur mon avenir et je m'en donne les moyens)
    •  effort pour me persuader : je suis d'autant plus motivé que je me sentirai l'auteur de ma propre réussite.

Engagement personnel - auteur de ma propre réussite. Pour Jacques Lévine, la partie n'est pas gagnée dans l'intervention des adultes et encore faut-il qu'ils ne soient ni passéistes, ni blasés, ni fatalistes mais encore détenteurs d'une grande autorité pédagogique (Jean Houssaye et Philippe Meirieu ne démentiront pas) et... humaine. Sans leurs présences, peut-on parler de perspectives d'avenir, de choses égales, d'accès à l'excellence pour chacun et de projet de vie ? Dans sa conférence, le psychologue passe en revue les qualités que l'on devrait trouver dans les pères  et les tuteurs à savoir donner la confiance en l'aventure  humaine (j'ai envie de vivre et de réussir) mais encore éliminer chez l'enfant toute peur de grandir (c'est la capacité d'alliance) et lui indiquer des repères formateurs (c'est la capacité de réalisme). Dans ce domaine Jacques Lévine rejoint et dépasse les objectifs de socialisation, on touche au sens de la vie qui consiste précisément à rendre vitales certaines évidences trop vite rejetées comme celle par exemple que l'être humain est porteur non seulement d'un présent et d'un passé mais d'une "trajectoire pour que la vie puisse continuer". Cette recherche d'équilibre et d'épanouissement, cette quête d'un humanisme proche de la transcendance, certains objecteront que ce n'est pas l'affaire de l'enseignant .

""""Point de vue personnel du rédacteur

Il n’empêche : qui peut nier qu’aujourd’hui, encore plus qu’hier sans doute, inciter et aider l’enfant à se situer dans le monde pour qu'il devienne un être "potentiellement  apportant" et qu'il se sente utile, fait partie, comme les apprentissages, du processus de toute structuration intellectuelle. Si l'on veut que cet effort d'adaptation et de réalisation de soi prenne corps, il faut savoir en insuffler l'élan nécessaire par le raisonnement, la persuasion, l'exemple et l'enseignement de la confiance. Ce sont là des piliers supplémentaires sur lesquels repose la motivation qui, les auteurs l'ont bien démontré à ce stade, est loin d'être seulement une affaire de tempérament.""""

Conclusion

La parole est à nouveau au rapport de jury 2003 :
"La conclusion apporte une réponse claire et précise à la problématique posée en introduction. elle met en évidence l'intérêt du dossier, sa pertinence par rapport au système éducatif, à ses enjeux, au rôle de ses acteurs. Elle propose une ouverture de réflexion". 

Puisque le sujet tourne autour de la notion de construction, il semble logique que l'on privilégie le rôle des acteurs. Les auteurs du dossier, tous formateurs, ne désapprouveraient pas cette orientation.

La conclusion proposée étant un peu longue, on pourra omettre les passages en italiques.

On retiendra de ce dossier que tous les acteurs - Jacques Lévine un peu plus que les autres - s'attachent à répondre de façon concordante au postulat initial formulé par Jean Houssaye : la motivation se construit ? Pour cela, donner du sens aux enseignements, aux attentes et aux objectifs et savoirs, orienter cette force aveugle vers des fins d'apprentissage qui constitueront le socle sur lequel reposent l'intégration, l'épanouissement de nos élèves. Une  restriction cependant pour chacun le mot "sens" recouvre des discours et des attitudes qui, même dotés d'un dénominateur commun se déclinent différemment : Philippe Meirieu en appelle au désir et à l'imagination tandis que LOMBARD, C. Delannoy et Jacques Lévine mettent en exergue la créativité, le désir de réussite, l'acquisition de la confiance alors que Jean Houssaye recommande le dialogue permanent entre les acteurs. Diversité ne signifiant pas absence de complémentarité, ces textes de réflexion plutôt que de pratique, font surgir par accumulations successives, le portrait du maître idéal ou du moins très complet dans ses talents, à la fois habile à profiter des expériences précédentes et en même temps à innover (Philippe Meirieu), compréhensif et ferme (Jean Houssaye), déclencheur d'enthousiasme et d'élan meneur (Jacques Lévine) exigeant au quotidien (Jean Houssaye, préparant l'avenir (C. Delannoy), ensemenceur (Jacques Lévine). Un peu charismatique nécessairement, c'est le portrait du pédagogue - conseiller - tuteur - qui saura faire adhérer non par l'incantation, mais parce qu'il aura bénéficié d'une formation qui régénère et qui motive à se régénérer en permanence. Excepté Jacques Lévine qui aborde franchement le problème, on devine chez les autres les divers aspects et études de cette formation : remise en cause personnelle (Philippe Meirieu), acceptation de ses propres échecs (Jean Houssaye), impérieuse nécessité de travail en équipe, source essentielle de motivation. C'est une vision à la fois inconfortable mais combien dynamisante du métier d'enseignant dont l'objectif fondamental, reconnu des cinq auteurs, consiste toujours à assurer la réussite maximale de l'élève. Pour chacun des partenaires de l'attelage "l'espace à investir" est désormais défini : des apprentissages, un dessein ambitieux, rétablir la confiance, voilà quelques-unes des composantes d'une motivation qui ne se donne pas mais qui se conquiert. C'est une affaire de volonté à la fois individuelle et collective : l'administration saura-t-elle retrouver ses "grands ancêtres totémiques", l'institution saura-t-elle à son tour redonner le sens de l'élan et du désir ?

Fin ... et bon courage